Pas en notre nom!
Des Juives et des Juifs de Belgique dénoncent les crimes d’Israël et l’inaction européenne
13 mai 2025
Juives et Juifs de Belgique, nous sommes profondément attaché·es aux valeurs humanistes héritées de notre histoire. C’est au nom de ces valeurs que nous exprimons notre indignation face aux souffrances infligées en ce moment par l’État d’Israël au peuple palestinien. À Gaza : bombardements ininterrompus dont le nombre de victimes civiles dépasse déjà les 52 000, en ce compris plus de 15 000 enfants, organisation méthodique de la famine, assassinats ciblés de journalistes et du personnel soignant, bouclage hermétique du territoire et nettoyage ethnique. En Cisjordanie : violence débridée perpétrée par des colons fanatisés avec les encouragements du gouvernement et le soutien de l’armée.
Ces massacres, qui sont constitutifs de génocide selon nombre de juristes internationaux et d’organisations de défense des droits humains, nous concernent et nous impliquent directement.
Ils nous impliquent comme citoyennes et citoyens de l’Union européenne. L’Europe ne peut rester indifférente à ce carnage qui se déroule à ses portes. Malgré son ampleur que plus personne ne peut ignorer, elle n’a pris aucune mesure de rétorsion. Elle n’a pas suspendu son accord d’association avec Israël, n’a pas interdit les livraisons d’armes, n’a pas rappelé son personnel diplomatique, n’a pris aucune mesure contre les colons violents dont de nombreux binationaux. L’inaction persistante de nos États face à ces massacres revient à un aveu de complicité. Elle nous fait honte.
Ils nous impliquent comme Juives et Juifs. La confusion entre l’État d’Israël et les Juives et Juifs du monde entier est entretenue de toutes parts. Pour une grande partie de l’opinion publique, être juif, être juive, c’est soutenir aveuglément l’État d’Israël quoi qu’il fasse. C’est là une des causes majeures de la résurgence de l’antisémitisme.
Les communautés juives ne sont pas monolithiques. Elles présentent une diversité d’opinions comme tous les groupes humains. Mais, sur tous les continents, à commencer par les États-Unis qui hébergent la communauté juive la plus importante hors d’Israël, de plus en plus de Juives et de Juifs affirment désormais « Pas en notre nom ». Nous en sommes.
Nous ne renions rien. Beaucoup d’entre nous ont des trajectoires familiales qui les rendent proches de la population juive d’Israël. Nous avons été révulsé·es par l’attaque terroriste menée par le Hamas le 7 octobre 2023. Nous restons solidaires des familles israéliennes qui attendent, dans l’angoisse et l’espoir, le retour des otages encore détenus. Mais cela ne saurait justifier que nous gardions le silence devant les crimes commis depuis lors.
Face à ces crimes, nous disons donc « Pas en notre nom ».
Nous disons « Pas en notre nom » aux autorités belges et européennes qui s’efforcent de ménager un État gouverné par l’extrême droite et choyé par tout ce que le monde compte aujourd’hui de fascistes. Huit décennies après la Libération, alors qu’on martèle « Plus jamais ça » comme un mantra, nous qui sommes les descendant·es de rescapé·es du plus grand génocide perpétré sur le sol européen, nous refusons que notre mémoire soit instrumentalisée pour justifier l’injustifiable.
Nous disons « Pas en notre nom » à nos concitoyen·nes qui se sentent en sympathie avec la cause palestinienne. Nous partageons leur aspiration à la justice sur cette terre meurtrie, une justice qui suppose la fin de la colonisation et de l’occupation, des poursuites contre les criminels de guerre et la pleine égalité des droits individuels et collectifs pour les deux peuples présents entre la Méditerranée et le Jourdain, selon des formes qu’ils détermineront eux-mêmes.
Comme Juifs et Juives de Belgique, nous appelons notre gouvernement et les responsables politiques européens à cesser toute complaisance à l’égard d’un État criminel et à lui imposer des sanctions en proportion avec la gravité des crimes commis.
L’Histoire jugera. Il est encore temps de choisir le camp de la justice et de l’humanité.